En cas de retard de prise en charge médicale, la responsabilité dépend du contexte médical de la prise en charge, de la pathologie du patient et des professionnels concernés, notamment l'hôpital, le médecin, ou l'organisation du service de santé.
Les principales situations et responsabilités associées :
1. L'hôpital ou l'établissement de santé
Les hôpitaux ont une obligation d’organiser leurs services de manière à garantir une prise en charge dans des délais raisonnables.
Dans un service d’urgence, le médecin doit prioriser les cas critiques. Un retard dans un contexte où une intervention immédiate était nécessaire peut être considéré comme une faute, surtout si la situation a été mal évaluée.
En cas de retard causé par une mauvaise organisation (manque de personnel, gestion des urgences inefficace), la responsabilité de l’établissement peut être engagée.
Si un retard dans la prise en charge d’une urgence entraîne une aggravation de l’état de santé ou un décès, l’hôpital peut être jugé fautif, sauf si le retard est dû à un afflux exceptionnel de patients (cas de force majeure).
2. Le médecin
Un médecin a une obligation de moyens, c'est-à-dire qu’il doit fournir des soins adaptés avec diligence et compétence.
Un retard injustifié dans la prise en charge peut engager sa responsabilité, en particulier si ce retard entraîne un préjudice pour le patient.
3. Coordination des soins entre les différents acteurs médicaux
Si un retard est causé par une mauvaise coordination entre différents services ou professionnels de santé (par exemple, transfert tardif entre services), la responsabilité peut être partagée entre les parties impliquées.
Les systèmes de triage (comme aux urgences) doivent être efficaces. Un mauvais triage ou une erreur d’évaluation des priorités peut engager la responsabilité de l’hôpital ou du personnel concerné.
Pour mieux comprendre les différentes responsabilités en fonction du contexte, voici quelques exemples de jurisprudence illustrant cette responsabilité :
1. Conseil national de l'ordre des médecins, 14 mars 2024, n° -- 15644 : "Par suite, le Dr A a méconnu l'obligation d'assistance à un malade en péril posée par les dispositions rappelées ci-dessus de l'article R. 4127-9 du code de la santé publique, ainsi que ses obligations de dévouement à ses patients, résultant de l'article R. 4127-3 du même code, de leur assurer des soins consciencieux et dévoués, figurant à l'article R. 4127-32, et de garantir la continuité des soins, ainsi que le prescrit l'article R. 4127-47.".
2. Tribunal administratif d'Orléans, 4ème chambre, 14 mars 2024, n° 2003745 : "Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise amiable, et il n'est aucunement contesté par le centre hospitalier de Châteaudun, qu'en dépit des constantes alarmantes de la patiente (hypoxémie sévère, tachycardie, polypnée) et de signes biologiques inquiétants, nécessitant un transfert en réanimation qui aurait dû être effectué dès le 19 octobre, l'établissement du diagnostic d'embolie pulmonaire par l'équipe médicale a été trop tardif, ce qui a conduit à l'administration d'un traitement inefficace et à des soins inappropriés."
3. Tribunal administratif de Rouen, 3ème chambre, 16 novembre 2023, n° 2102237 : "Il résulte de l'instruction et notamment des rapports de l'expert que le compte rendu de l'examen radiologique dont Mme A a fait l'objet aux services des urgences, qui fait état d'une fracture tassement du corps vertébral, a été rédigé postérieurement sans être transmis à la patiente, alors que les doutes persistants sur son état de santé et l'expression de sa symptomatologie nécessitaient, selon l'expert désigné par le tribunal, la réalisation d'un scanner ou d'une IRM qui aurait permis un diagnostic précis sans délai. Cette erreur dans la méthode diagnostique, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle présentait une difficulté particulière, en dépit de l'état antérieur de Mme A, qui souffrait d'ostéoporose et du syndrome de Gougerot, constitue une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen, ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas."
4. Tribunal administratif de Paris, 22 novembre 2023, n° 2204549 : "L'expert concluant ainsi que les soins dispensés par l'hôpital Saint-Antoine, n'ont pas été » adéquats " et l'AP-HP ne contestant, pas sa responsabilité, l'existence de l'obligation dont se prévaut M me C à raison d'une faute commise dans sa prise en charge par cet hôpital ce titre n'est pas sérieusement contestable."
En conclusion, la responsabilité en cas de retard de prise en charge aux urgences peut être attribuée aux professionnels de santé ou aux établissements hospitaliers si des fautes sont commises dans la prise en charge des patients, compromettant ainsi leurs chances d'obtenir une amélioration de leur état de santé ou d'échapper à une aggravation de leur état de santé.