Assistance apportée à la victime et impossibilité d’avoir une vie professionnelle stable : Indemnisation

Arrêt Conseil d’Etat 6 août 2021 – n°431196

Les faits

A la suite d’une intervention chirurgicale, Melle C D conserve de lourdes séquelles nécessitant la présence d’une aide humaine quotidienne. 

La responsabilité de l’Etablissement de santé ayant été reconnue par un arrêt définitif du 5 avril 2012 par la cour administrative d’appel de Paris, avec un droit à une réparation sur la base d’un taux de perte de chance de 95%, le débat porte sur la propre indemnisation de sa mère et notamment sur l’impossibilité d’avoir une activité professionnelle stable.

Dans son arrêt infirmatif rendu le 29 mars 2019, la cour administrative d’appel de Paris fixe une indemnisation forfaitaire pour la mère à la somme de 57.000 euros au titre des troubles dans les conditions d’existence.

Madame B., mère de Melle D, fait grief à l'arrêt d’avoir considéré que ce poste de préjudice intégrait sa perte de salaire alors même que le tribunal administratif d’appel de Paris, pour la période courant des 18 ans au 25 ans de Melle D, a jugé qu’une somme devait lui être allouée à hauteur de 340.056,34 euros au titre du préjudice résultant des conséquences du handicap de sa fille sur sa propre activité salariée.

L’arrêt rendu par le Conseil d’Etat et son analyse

Dans son arrêt rendu le 6 août 2021, le Conseil d’Etat indique :

« En jugeant, ainsi qu’il résulte des termes mêmes de l’arrêt attaqué, que le préjudice de Mme B faisait état, résultant à la fois de l’aide quotidienne qu’elle était amenée à apporter à sa fille lourdement handicapée, malgré la présence de tierces personnes rémunérées par cette dernière, ainsi que des pertes de rémunération résultant de l’impossibilité d’avoir, en raison de sa présence régulière auprès de sa fille, une activité professionnelle stable et, enfin, de ses conditions d’existence dégradées, pouvait être globalement indemnisé au titre des troubles dans ses conditions d’existence, sans identifier spécifiquement un poste de préjudice professionnel, la cour administrative d’appel n’a, contrairement à ce que soutient la requérante, pas commis d’erreur de droit.

En estimant que ce préjudice devait être fixé à la somme forfaitaire de 57.000 euros, compte tenu du coefficient de perte de chance fixé à 95% par son précédent arrêt du 5 avril 2012, la cour s’est livré à une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis et n’a pas commis d’erreur de droit. Contrairement à ce que soutient la requérante, elle a suffisamment motivé son arrêt sur ce point. » 

Selon la nomenclature Dintilhac, le préjudice subi par les personnes qui partagent habituellement une communauté de vie avec la personne handicapée et qui voient leur mode de vie bouleversé, éprouvant de fait des troubles dans leurs conditions d’existence fait partie intégrante des préjudices extrapatrimoniaux exceptionnels.

En raison de son caractère extrapatrimonial, ce poste de préjudice n’a pas, en principe, pour objet de réparer les conséquences financières subies par les proches du fait du handicap de la victime directe, telles que les frais d’assistance (CE, 10 décembre 2015, n°374038) ou le préjudice professionnel (CE, 17 mai 2006, n°272525).

Cependant, selon le Conseil d’Etat, ces préjudices, par ailleurs d’ores et déjà indemnisés à la victime directe du fait de l’indemnisation allouée au titre de l’aide humaine, font partie intégrante des troubles dans les conditions d’existence.


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