Le retard de prise en charge et la qualité des soins aux urgences : Quels recours pour les patients ?

Le retard de prise en charge et la qualité des soins aux urgences demeurent des questions très préoccupantes actuellement en France.

Deux affaires tristement médiatiques : l’histoire de la sœur de Thérèse, décédée pour ne pas avoir pu bénéficier d’une injection d’antibiotiques et l’histoire du jeune Théo, âgé de seulement 7 mois, décédé d’une septicémie consécutive à une invagination intestinale, nous le rappellent.

Ce ne sont malheureusement pas des cas isolés.

Si le nombre croissant de patients arrivant aux urgences est une réalité et qu’en parallèle plusieurs services d’urgences ferment totalement ou partiellement dans les hôpitaux, il n’en demeure pas moins qu’il n’est pas acceptable que des patients dont la gravité des symptômes a été méconnue à leur arrivée, soient soignés tardivement, que certains conservent des séquelles du fait d’un retard de prise en charge ou même meurent du fait des urgences qui sont débordés ou du personnel soignant pas suffisamment formé pour détecter les cas les plus sérieux. 

J’observe dans mon métier d’avocat, intervenant pour les victimes d’erreurs médicales, que le nombre de patients dont la sévérité des troubles n’a pas été prise au sérieux dès leur entrée dans le service des urgences s’est accru ces dernières années.

Pour certains, ils patientent des journées entières avant d’être pris en charge amenant quelques patients à quitter l’hôpital avant même d’avoir été examinés. Pour d’autres, la prise en charge est limitée à un simple examen médical sans investigations complémentaires. D’autres encore, reviennent plusieurs fois inquiets car leur pathologie ne cesse de s’aggraver et que le personnel soignant du service des urgences les renvoie chez eux estimant que les victimes exagèrent leurs symptômes.

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Les exemples de cas recensés

Dans mes dossiers, j’ai notamment le cas d’une jeune patiente dont la mère infirmière s’est rendue trois fois aux urgences avec sa fille, âgée de 8 ansLa prise en charge tardive de la méningo-encéphalite à pneumocoque, qui n’a pas été détectée avant qu’elle ne sombre dans le coma, est à l’origine d’importants troubles neuromoteurs et cognitifs dont elle souffre aujourd’hui.

J’ai également le cas de clients dont leur mère s’est présentée au service des urgences dans un Etablissement de santé parisien, très essoufflée et ayant de grandes difficultés à respirer au point d’être soutenue par son neveu pour marcher. Malgré des signes cliniques très alarmants, l’hôpital n’a pas jugé utile de demander l’avis du service cardiologique de l’hôpital et/ou de l’hospitaliser. Le service des urgences s’est contenté de la renvoyer à son domicile en lui indiquant simplement de prendre rendez-vous avec un cardiologue. Ne maîtrisant pas le français, cette patiente est rentrée chez elle et a attendu le rendez-vous de contrôle préalablement fixé par sa pneumologue 10 jours plus tard. Malheureusement, le jour même de son rendez-vous avec la pneumologue, elle a présenté un arrêt cardiorespiratoire et est décédée.

J’ai aussi le cas de clients dont leur père s’est rendu aux urgences car il présentait des douleurs importantes localisées au niveau des membres inférieurs et du bassin. Le service des urgences l’a simplement ausculté et lui a donné des antidouleurs. Malgré ses antécédents médicaux cardiaques et vasculaires, aucune autre investigation n’a été réalisée. Le service des urgences l’a laissé rentrer seul, sans même tenter de joindre sa famille, avec une simple prescription d’anti douleurs. Au sortir de l’hôpital et dans la rue, ce patient a fait un malaise cardiaque. Appelés par un témoin, les pompiers sont arrivés très rapidement pour pratiquer un message cardiaque et tenter de le réanimer. La réanimation s’est soldée par un échec et ce monsieur est malheureusement décédé presque juste à côté de l’hôpital où l’on avait refusé de l’hospitaliser.

Quels recours envisagés pour les patients, victimes d’un défaut de prise en charge, ou leur famille en cas de décès ?

Il est tout d’abord essentiel de recueillir des preuves, comme l’obtention des dossiers médicaux complets et des témoignages des proches, pour renforcer le dossier en cas de poursuites judiciaires. 

Il est également important de caractériser les séquelles en lien avec l’absence de prise en charge conforme ou que le décès du patient a une relation directement causale avec la non hospitalisation.

Chaque cas étant néanmoins unique, il est fortement recommandé de consulter un professionnel du droit pour obtenir des conseils juridiques adaptés à chaque situation particulière.

Voici les recours possibles :

Les recours amiables

  1. Saisir la Commission des Relations avec les Usagers et de la Qualité de la Prise en Charge (CRUQPC) : La CRUQPC est une instance présente dans chaque établissement de santé. Elle peut être saisie par le patient pour examiner les plaintes et les réclamations. Elle intervient en tant qu'interlocuteur entre le patient et l'établissement.
  2. Saisir la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI) : La CCI est une Commission chargée de rendre un avis sur les conditions de prise en charge d’un patient et de déterminer les responsabilités des acteurs de santé. Préalablement, la Commission désignera un ou plusieurs Experts médicaux chargés d’analyser le dossier médical du patient en vie ou décédé en présence du ou des plaignants et des mis en cause. Ils déposeront ensuite un rapport d’expertise qui sera débattu par les parties dans le cadre d’une réunion organisée devant la Commission.

Les recours judiciaires

  1. Engager une action en responsabilité médicale devant le Tribunal Civil ou devant le Tribunal Administratif : Si le retard de prise en charge a causé des dommages graves ou le décès du patient, il peut être envisageable d'engager une action en responsabilité médicale devant les tribunaux. Cela implique de démontrer que le retard a directement contribué aux préjudices subis et que le personnel médical a commis une faute. Préalablement, il sera nécessaire de solliciter une expertise judiciaire par une action en référé.
  2. Déposer une plainte pénale : Il est possible de déposer une plainte pénale auprès du Commissariat ou de la gendarmerie ou d’adresser directement une plainte au parquet. Eu égard à la complexité de l’enquête, une juge d’instruction pourra être saisi. Son rôle sera d’instruire le dossier à charge et à décharge en faisant appel à des techniciens (experts médicaux), organisera des interrogatoires, et déterminera si des infractions pénales sont susceptibles d’être retenues à l’encontre du personnel de soin (blessures et/ou homicide involontaire, non assistance à personne en danger…)
  3. Saisir l'Ordre des médecins : En cas de comportement déontologiquement répréhensible de la part d'un professionnel de santé, il est possible de déposer une plainte auprès de l'Ordre des médecins. L'Ordre peut enquêter sur les pratiques médicales et prendre des mesures disciplinaires si nécessaire.

Pour toute question, vous pouvez joindre le Cabinet de Maître CARRE-PAUPART, intervenant pour les victimes d’erreurs médicales.


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